Oui, les X-Men sont morts — et ils continueront de mourir parce que c’est la nature de leur profession. Ce sont des héros. Mais l’équipe n’a pas été fondée — tu n’y as pas consacré ta vie — seulement pour combattre les mauvais mutants. Le rêve, Charles, c’était d’aider les mutants à apprendre à vivre avec leurs pouvoirs. Et d’aider la société à les accepter. [Moira MacTaggert]
Chris Claremont, The New Mutants,Marvel Graphic Novel #4 (1982)
En 1982, il n’était pas encore courant chez Marvel de produire des séries dérivées de ses grands succès. Aujourd’hui, ça laisse rêveur, mais produire un second titre qui tienne compagnie aux Uncanny X-Men relevait de la gageure.
Alors que dans la série principale, les X-Men sont coincés au fin fond de l’empire galactique Shi’ar, sur Terre, le professeur Charles Xavier finit par se laisser convaincre par Moira MacTaggert de rouvrir son école et former de nouveaux mutants.
Le principe est simple: on ressort le concept de base et on reprend l’histoire à ses débuts. Les nouveaux mutants ne sont pas censés être des super-héros mais bien des étudiants, dans une école qui, en plus de leur éducation générale, se charge de leur enseigner la maîtrise de leurs pouvoirs.
Pendant deux ans, cette série a vivoté à côté de sa grande sœur sans proposer de sagas inoubliables. La nouvelle équipe s’oppose aux Sentinelles, au Hellfire Club, à son école rivale la Massachusetts Academy, et quitte rapidement la salle de classe pour découvrir Nova Roma… Il faudra attendre l’arrivée d’Illyana Rasputin pour que la dynamique devienne intéressante, mais la saga de Magik dans les limbes se déroule dans une mini-série parallèle.
C’est véritablement l’arrivée de Bill Sienkiewicz en 1984 qui a placé cette série dans l’histoire des comics.
Dès la première page du numéro 18, la différence est spectaculaire. Danielle Moonstar est en pleine terreur nocturne, emmitouflée dans une couverture aux carreaux irréguliers qui se transforme vers le bas de l’image en une tête de grizzly rouge. Dans les pages qui suivent, on voit tour à tour l’école exploser, le professeur Xavier mourir dans ce qui s’avère être les souvenirs d’un nouveau personnage (Rachel Summers), et comme si ce n’était pas assez, page 11, apparaît l’alien le plus graphiquement unique de l’histoire de la BD (qui ne sera jamais justement dessiné par aucun autre artiste): Warlock.
Il faut dire que les traits de Sienkiewicz sont inimitables. Sur la même page, il allie des lignes griffonnées à la limite de l’abstraction et des éléments d’un réalisme inattendu, le tout avec une mise en page dynamique très inspirée des meilleures œuvres de Neal Adams. En 1982, la qualité du papier des comics est très insuffisante pour rendre pleinement le talent de ce dessinateur, et la noirceur de ses encres domine, ce qui force le lecteur à regarder de près pour s’imprégner de l’ensemble.
Revitalisé par cet artiste, Chris Claremont commence à produire des histoires qui retrouvent le souffle épique des X-Men sans puiser dans la galerie des personnages classiques. Les Nouveaux Mutants deviennent vraiment nouveaux. Les sagas s’enchaînent: l’ours démon, Cloak & Dagger, Legion, les Gladiateurs. Mais trop vite, Bill Sienkiewicz passe à d’autres projets et la série ne retrouvera jamais la même qualité.
En 1990, Louise Simonson, qui a repris les scénarios depuis quelques années, se voit adjoindre le petit génie de l’époque, Rob Liefeld, qui du haut de ses 21 ans, révolutionne le titre. Son style vaut ce qu’il vaut, mais il fait vendre. Avec l’introduction de Cable, dans l’épisode 87 et de Deadpool dans l’épisode 98, les New Mutants de Liefeld sont en phase avec l’époque, même s’ils n’ont plus rien à voir avec l’idée d’origine. L’épisode 100 marquera la fin de leurs aventures et ils deviennent X-Force le mois suivant, avec un n°1 qui se vend à plus de 5 millions d’exemplaires.
Les nouveaux mutants et Legion sont en production dans l’univers cinématographique Fox. A suivre…
[wc_box color= »primary » text_align= »left »]
Les nouveaux mutants sont assez loin de mon univers, c’est du moins ce que je croyais jusque très récemment. En fait, leur influence, plus que celle des X-Men en général, est sensible dans de nombreux éléments des Chroniques d’Enghashel. Ce qui est évident dès le début du cycle ne l’était pas à la conception : la huitaine de Gaha est un groupe de jeunes novices qui doivent apprendre à utiliser leurs pouvoirs sous la houlette d’une vieille femme… évidemment, il y a des points communs. Mais je ne suis pas parti avec cette idée en tête. A l’origine, Llyna était plus jeune et ne faisait pas partie d’un groupe. Parfois, les influences sont plus insidieuses qu’on le pense. Pour moi, c’est la saga de l’ours démon qui a des résonances beaucoup plus conscientes dans la création d’Enghashel. Mais évidemment, c’est le nom (repris récemment) et la nature des limbes qui ont les liens les plus directs avec la série.
[/wc_box][wc_box color= »inverse » text_align= »left »]
ALLER PLUS LOIN:
- Ici
- Ailleurs en VO
The Art of Bill Sienkiewicz (Forbidden Planet [lien]
Bill Sienkiewcz – This Beast (interview et dessins)
- Comics de référence
The New Mutants (1983) #1-100 + Graphic Novel 4 (1982) créé par Chris Claremont et Bob McLeod – publié en France dans Titans n°59-160 ; édition de qualité des épisodes de Sienkiewicz dans Collection Super-héros (Comics USA) n°43-47
Magik (1983) #1-4 par Chris Claremont et John Buscema – publié en France ???
[/wc_box]